La loi n°2021-1040 du 5 août 2021 relative à la gestion de la crise sanitaire a été publiée au Journal Officiel. Ce texte s'inscrit dans la continuité des mesures annoncées par le Président de la République Emmanuel Macron lors de son allocution aux Français le 12 juillet dernier, pour faire face à la reprise épidémique due au variant dit "Delta" : passe sanitaire obligatoire pour accéder à certains lieux, établissements ou événements, et obligation vaccinale pour certaines professions en contact avec le public.

Le texte final comporte 21 articles, dont certains concernent plus particulièrement les pharmaciens :

  • Prolongation du régime transitoire de sortie de l’état d’urgence sanitaire et mesures de restriction de circulation des personnes et d’accès à certains établissements recevant du public (ERP) (Article 1er)
  • Obligation vaccinale pour certaines catégories de professionnels (Article 12)
  • Modalités de satisfaction à l’obligation vaccinale (Article 13)
  • Suspension d’activité et interdiction d’exercice (Article 14) 

Dans sa décision n°2021-824 DC du 5 août 2021, le Conseil constitutionnel, tout en admettant la conformité à la Constitution de dispositions concernant le "passe sanitaire", a censuré les dispositions de la loi organisant la rupture anticipée de certains contrats de travail et le placement "automatique" à l’isolement, qu’il juge contraires à la Constitution. 

 

Prolongation du régime transitoire de sortie de l’état d’urgence sanitaire et mesures de restriction de circulation des personnes et d’accès à certains ERP (Article 1er)

1. Passe sanitaire

Le régime transitoire de sortie de l’état d’urgence sanitaire (EUS) est prolongé jusqu’au 15 novembre 2021. Pendant cette période, le Premier ministre pourra continuer de disposer de prérogatives étendues en matière de restriction de circulation des personnes souhaitant se déplacer à destination ou en provenance du territoire hexagonal, de la Corse ou de l'une des collectivités mentionnées à l'article 72-3 de la Constitution, et d’accès à certains ERP "dans les parties du territoire où une circulation active du virus est constatée".

Un passe sanitaire pourra être imposé pour les déplacements au départ et à l’arrivée du territoire, et être étendu à d’autres lieux, établissements, services ou événements pour des activités de loisirs, des foires ou des salons professionnels par exemple.

Le texte prévoit d’appliquer le passe sanitaire à « certains lieux, établissements, services ou événements » pour :

  • Les activités de loisirs
  • La plupart des activités de restauration commerciale ou de débit de boisson
  • Les foires, séminaires, ou salons professionnels
  • Les services et établissements de santé, sociaux et médico-sociaux, pour les seuls accompagnants ou visiteurs ou les personnes accueillies pour des soins programmés (sauf cas d’urgence)
  • Les activités de transport public de longue distance au sein du territoire national (sauf en cas d’urgence)

En ce qui concerne les grands magasins et centres commerciaux, une évaluation sera effectuée au cas par cas sur décision motivée du Préfet.

Le passe sanitaire repose toujours sur la présentation alternative du résultat d’un test de dépistage virologique négatif au Covid-19, d’un justificatif de vaccination ou d’un "certificat" de rétablissement après une contamination par l’épidémie de Covid-19 (papier ou numérique). Lorsque la gravité des risques de contamination le justifie en lien avec l'exercice des activités qui y sont pratiquées, la réglementation est rendue applicable au public et, à compter du 30 août 2021, aux personnes qui interviennent dans ces lieux, établissements, services ou événements. Elle est rendue applicable aux mineurs de plus de 12 ans à compter du 30 septembre 2021.

L’application de cette réglementation ne dispense pas de la mise en œuvre de mesures de nature à prévenir les risques de propagation du virus si la nature des activités réalisées le permet.

2. Suspension du contrat de travail

Lorsqu’un salarié soumis à l’obligation de passe sanitaire ne présente pas les justificatifs, certificats ou résultats dont la présentation est imposée, et s’il choisit de ne pas utiliser, avec l’accord de son employeur, des jours de repos conventionnels ou des jours de congés payés, ce dernier lui notifie par tout moyen, le jour même, la suspension de son contrat de travail. Elle s’accompagne d’une interruption du versement de la rémunération, et prend fin dès que le salarié produit les justificatifs requis. Si cette situation se prolonge au-delà d’une durée équivalente à 3 jours travaillés, l’employeur convoque le salarié à un entretien afin d’examiner avec lui les moyens de régulariser sa situation, notamment les possibilités d’affectation, le cas échéant temporaire, au sein de l’entreprise à un autre poste non soumis à cette obligation. Des dispositions similaires sont prévues pour les agents publics.

3. Mécanisme de contrôle et sanctions

Le texte prévoit des mesures de fermeture administrative, et des sanctions allant de la contravention à la peine d’emprisonnement en cas :

  • d’absence de contrôle par l’exploitant d’un lieu ou d’un établissement du passe sanitaire ;
  • de présentation d’un passe sanitaire appartenant à autrui ;
  • de proposition à un tiers de manière onéreuse ou non, y compris par voie numérique, de l’utilisation frauduleuse d’un passe sanitaire.

Lorsqu'une procédure est engagée à l'encontre d'un professionnel de santé concernant l'établissement d'un faux certificat médical de contre-indication à la vaccination contre la Covid-19, le procureur de la République en informe, le cas échéant, le conseil national de l'ordre duquel le professionnel relève.

4. Simplification de l’autorisation parentale et vaccination sans accord parental dès 16 ans

Seule l’autorisation parentale de l’un ou de l’autre des titulaires de l’autorité parentale est requise pour la réalisation d’un dépistage ou l’injection du vaccin contre l’épidémie de Covid-19, sans préjudice de l’appréciation des éventuelles contre-indications médicales. La vaccination peut par ailleurs être pratiquée, à sa demande, sur le mineur de plus de 16 ans.

5. Etat d’urgence sanitaire en Outre-mer

L’état d’urgence sanitaire déclaré par décret du 13 juillet 2021 sur les territoires de la Martinique et de la Réunion est prorogé jusqu’au 30 septembre inclus. L’état d’urgence sanitaire sur le territoire de Guadeloupe, de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin est également déclaré à compter du lendemain de la publication de la loi et jusqu’au 30 septembre 2021 inclus. Si l’EUS est déclaré sur le territoire de Mayotte avant le 30 août 2021, celui-ci est applicable jusqu’au 30 septembre inclus.

 

Obligation vaccinale pour les salariés, agents publics et libéraux (Article 12)

L’article 12 porte sur l’obligation vaccinale contre le Covid-19 pour toute une série de personnes. Il dispose qu’à l’avenir, "doivent être vaccinés, sauf contre-indication médicale reconnue, contre la Covid-19" huit catégories de personnes.

Parmi ces catégories de personnes, on notera notamment celles qui exercent en établissements de santé publics et privés, ainsi que dans les hôpitaux des armées, les centres de santé, les maisons de santé, ou encore les établissements et services sociaux et médico-sociaux et les établissements, foyers-logements et les résidences-services accueillant des personnes âgées ou handicapées.

Sont ensuite concernés l’ensemble des professionnels de santé mentionnés à la IV° partie du code de la santé publique, dont les pharmaciens, préparateurs en pharmacie et en pharmacie hospitalière, et techniciens de laboratoire médical ainsi que les professionnels à usage de titre. Les étudiants et les personnes travaillant dans les mêmes locaux sont également concernés, sauf les personnes chargées d’une tâche ponctuelle.

Sont enfin concernés d'autres professionnels tels que les professionnels de l’aide à domicile, les sapeurs-pompiers et les marins-pompiers des SDIS, les transporteurs sanitaires et les prestataires de services et distributeurs de matériel médical.

Un décret, pris après avis de la HAS, détermine les conditions de vaccination contre la Covid-19 des personnes mentionnées ci-dessus.

 

Modalités de satisfaction à l’obligation vaccinale (Article 13)

Satisfont à l’obligation, soit les personnes qui présentent un certificat de statut vaccinal complet ou un certificat de rétablissement.

Ne sont pas soumises à cette obligation les personnes qui disposent d’un certificat médical de contre-indication.

1. S’agissant des professionnels salariés et agents publics

Les salariés et agents publics devront justifier de leur vaccination auprès de leur employeur. En cas de rétablissement ou de contre-indication à la vaccination, les certificats de rétablissement ou de contre-indication à la vaccination peuvent être adressés au médecin du travail compétent qui informe sans délai l’employeur de la satisfaction à l’obligation vaccinale, avec, le cas échéant, le terme de validité du certificat transmis (en cas de rétablissement suite à une infection à la Covid-19).

2. S’agissant des professionnels de santé libéraux

Afin d’éviter aux professionnels de santé libéraux soumis à l’obligation vaccinale d'envoyer leur certificat de statut vaccinal, et aux ARS de procéder à des vérifications manuelles de ces documents, les ARS pourront accéder aux données relatives au statut vaccinal avec le concours des organismes locaux d’assurance maladie. En cas d’absence du certificat de statut vaccinal, les professionnels libéraux adressent à l’ARS compétente le certificat de rétablissement ou le certificat médical de contre-indication.

3. Procédures de contrôle, de conservation des données et de sanctions

Il est prévu une procédure de contrôle des certificats médicaux de contre-indication par le médecin-conseil de l’organisme d’assurance maladie auquel est rattachée la personne concernée.

Les employeurs et les ARS peuvent conserver les résultats des vérifications de satisfaction à l’obligation vaccinale contre l’épidémie de Covid-19 jusqu’à la fin de l’obligation vaccinale, en s’assurant de la conservation sécurisée de ces documents et de leur bonne destruction à la fin de l’obligation vaccinale.

Les employeurs sont chargés de contrôler le respect de l’obligation vaccinale par les personnes placées sous leur responsabilité. Les ARS sont chargées de contrôler le respect de cette même obligation par les autres personnes concernées.

L’établissement et l’usage d’un faux certificat de statut vaccinal ou d’un faux certificat médical de contre-indication à la vaccination contre l’épidémie de Covid-19 est puni pénalement.

Lorsqu’une procédure est engagée à l’encontre d’un professionnel de santé concernant l’établissement d’un faux certificat médical de contre-indication à la vaccination contre la Covid-19, le procureur de la République en informe, le cas échéant, le conseil national de l’ordre duquel le professionnel relève.

 

Suspension d’activité et interdiction d’exercice (Article 14)

1. Une seule dose exigée jusqu’au 15 octobre

Pour une période transitoire s’étalant du lendemain de la publication de la présente loi au 14 septembre 2021 inclus, les professionnels soumis à l’obligation vaccinale ne pourront plus exercer leur activité s’ils ne présentent pas de certificat de statut vaccinal complet, de rétablissement ou de contre-indication, ou le justificatif de l’administration des doses de vaccins requises ou le résultat de l’examen de dépistage virologique ne concluant pas à la contamination par la Covid-19

A compter du 15 septembre et jusqu’au 15 octobre 2021 inclus, ces mêmes professionnels ne pourront exercer que s’ils justifient de l’administration d’au moins une des doses requises et du  résultat d’un dépistage virologique ne concluant pas à une contamination à la Covid-19. A compter du 16 octobre, ils ne pourront plus exercer leurs activités sans  justifier de l’administration de l’ensemble des doses requises.

2. Sanctions

Pour les professionnels salariés et les agents publics : en cas de manquement de ces personnes à leur obligation vaccinale, leur employeur les informe sans délai des conséquences qu'emporte cette interdiction d'exercer sur leur emploi ainsi que des moyens de régulariser leur situation. Le professionnel qui fait l'objet d'une interdiction d'exercer peut utiliser, avec l'accord de son employeur, des jours de repos conventionnels ou des jours de congés payés. A défaut, le contrat de travail du professionnel salarié est suspendu et le professionnel, agent public, est suspendu de ses fonctions. Cette suspension est accompagnée de l’interruption du versement de leur rémunération.

Cette suspension prend fin dès que le professionnel remplit les conditions nécessaires à l'exercice de son activité. Elle ne peut être assimilée à une période de travail effectif pour la détermination de la durée des congés payés ainsi que pour les droits légaux ou conventionnels acquis par le professionnel au titre de son ancienneté. Pendant cette suspension, le professionnel conserve le bénéfice des garanties de protection sociale complémentaire auxquelles il a souscrit.

Lorsque le contrat à durée déterminée d'un professionnel est suspendu, le contrat prend fin au terme prévu si ce dernier intervient au cours de la période de suspension.

Pour les professionnels libéraux : Les agences régionales de santé vérifient que les professionnels de santé libéraux qui ne leur ont pas adressé leur justificatif de vaccination (ou de rétablissement, ou de contre-indication) ne méconnaissent pas l’interdiction d’exercer leur activité.

Lorsque l'employeur ou l'ARS constate qu'un professionnel de santé ne peut plus exercer son activité depuis plus de 30 jours en raison de de non satisfaction à l’obligation vaccinale, il en informe, le cas échéant, le conseil national de l'ordre dont il relève.