L’ordonnance « maillage territorial » publiée le 4 janvier 2018 au Journal officiel était très attendue par l’ensemble de la profession. Discutée depuis plusieurs mois avec le ministère de la santé, elle constitue plus une évolution qu’une révolution des conditions de création, transfert, regroupement et cession d’officines. Elle en clarifie certaines et en assouplit d’autres avec réalisme, tout en sauvegardant les grands principes.
 

Voilà deux ans que ce texte était attendu ! Depuis la publication de la loi de modernisation de notre système de santé du 26 janvier 2016. On peut donc se féliciter de voir enfin aboutir ce dossier. Tout en clarifiant les règles de transfert et de regroupement d’officines, le texte répond à  une double logique d’optimisation de la desserte et d’apport de solutions spécifiques pour des zones où l’accès au médicament n’est pas satisfaisant au regard des besoins de la population.

Le maintien des fondamentaux

Les modifications du Code de la santé publique obéissent ici à trois objectifs : sécuriser les implantations en définissant mieux les conditions requises ; répondre aux problématiques des territoires fragiles ; et lever des blocages ponctuels. « Cette “ordonnance réseau” est intéressante car elle présente un certain nombre de garanties sur la proximité d’accès, mais aussi des avancées pour adapter les règles de répartition des officines à l’évolution des modes d’exercice », réagissent de concert Alain Delgutte, président du conseil central de la section A (représentant les pharmaciens titulaires d’officine), et Brigitte Berthelot-Leblanc, présidente du conseil central de la section E (représentant les pharmaciens exerçant outre-mer).

Tout d’abord, les fondamentaux sont conservés pour l’octroi d’une licence, avec le maintien  d’une autorisation donnée par l’ARS, fondée sur les besoins de la population résidente.  Les seuils démographiques demeurent inchangés.

La desserte de la population enfin définie

Le pharmacien y gagne aussi en clarté sur la notion d’« optimalité » de la desserte, qui repose sur des critères de facilité d’accès, de conformité des locaux et d’une population résidente à desservir. « Nous avons été écoutés sur ce point fondamental, alors que le ministère avait, à un moment, émis comme souhait de prendre davantage  en compte les flux de population. Or il nous semble primordial de baser la desserte officinale sur une relation de proximité entre le pharmacien et les patients  », relève Alain Delgutte. Les critères à partir desquels l’Agence régionale de santé (ARS) délimitera un « quartier » d’implantation sont eux aussi, pour la première fois, caractérisés. « La définition de “desserte en médicaments optimale ” est donc désormais établie concrètement à partir de quartiers délimités, alors qu’elle était jusque-là assez diffuse, basée sur la jurisprudence. Toutes ces précisions montrent le pragmatisme de ce texte », complète-t-il.

Adaptabilité, lisibilité et prévisibilité

On retrouve ce pragmatisme dans l’approche des problématiques liées à certains territoires ou aux aéroports : on lève des blocages et l’on apporte des solutions. Les pharmacies d’aéroport pourront par exemple ouvrir une annexe « côté piste ». On peut aussi mentionner la suppression de l'interdiction de cession pendant 5 ans après un transfert, la facilitation des transferts au sein d’un même quartier,  ou lorsque l’officine est seule dans sa commune ou dans certains territoires , ou bien la possibilité de regroupements en tout point du territoire et non plus seulement dans une des communes d’origine des officines… Ce réalisme est encore présent dans la clarification des situations des communes nouvelles, ou encore dans le délai de deux ans désormais accordé pour ouvrir l’officine après notification de l’arrêté de licence…

In fine, on voit que le pharmacien gagnera en adaptabilité (souplesse), en lisibilité (clarification de notions jusque-là non définies) et en prévisibilité. Rappelons que cette ordonnance entrera en vigueur à la date de publication de ses décrets d’application lorsqu’ils sont nécessaires et, au plus tard le 31 juillet 2018.

Ordonnance n° 2018-3 du 3 janvier 2018 relative à l'adaptation des conditions de création, transfert, regroupement et cession des officines de pharmacie