Le 13 décembre dernier, le tribunal correctionnel de Paris a infligé à la gérante d’une boutique une peine d’emprisonnement de huit mois avec sursis, une amende de 3 000 euros, l’interdiction d’exercer toute profession en lien avec la vente pendant cinq ans et la publication, à ses frais, de la décision de justice sur les réseaux sociaux pendant deux mois. Cette affaire illustre les risques liés aux pratiques esthétiques non encadrées, témoignant d’une vigilance accrue des autorités quant aux dérives de ce secteur en pleine expansion.

Ce dossier s’inscrit parmi les nombreux cas d’usage détournés de substances actives qui alimentent le trafic de médicaments (usages toxicomaniaques, anabolisants, anorexigènes, à des fins éclaircissantes, etc.).

L’affaire a débuté en 2020 par un courrier adressé au CNOP par la mère d’une jeune femme de 20 ans, victime d’un sirop acheté dans une boutique parisienne, et dont la consommation l’a amenée à une hospitalisation après un passage aux urgences. Il apparaissait que ce sirop lui avait été recommandé pour prendre des « rondeurs ».

À la suite d’un signalement du CNOP au procureur de la République de Paris, une perquisition, au sein de la boutique, a permis la saisie d’un stock de produits de différentes marques, dont les analyses ont révélé qu’ils étaient composés non seulement de bétaméthasone (corticoïde), mais surtout de cyproheptadine (antihistaminique).

Il apparaît que ce dernier principe actif a été popularisé sur les réseaux sociaux dans le cadre d’une prise de poids à des fins esthétiques. Cette soudaine popularité a conduit l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) à réagir. 

Ainsi, en janvier 2022, l’ANSM a adressé une lettre d’information de sécurité aux pharmaciens sur le risque d’utilisation non conforme et potentiellement dangereuse de la cyproheptadine, comme orexigène pour induire une prise de poids à des fins esthétiques. En outre, depuis juillet 2024, la dispensation de la spécialité Periactine® n’est possible que sur ordonnance (liste I).

Les analyses ont également révélé que le dosage annoncé sur le conditionnement du produit était 3,5 fois inférieur à sa teneur réelle en substance active. Les produits étaient vendus sous forme de flacon au prix de 20 euros ou de comprimés au prix de 10 euros l’unité.

C’est dans ces conditions que la gérante de la boutique a été poursuivie, notamment pour exercice illégal de la pharmacie et pour infraction à la réglementation sur les substances vénéneuses. La prévenue n’a pas contesté avoir promu et vendu ces produits, mais elle a affirmé qu’elle n’avait pas conscience de contrevenir aux règles en vigueur, pensant vendre de simples « vitamines ». Le tribunal n’a pas été convaincu par ses explications et a, au contraire, retenu que les infractions étaient bien caractérisées.  Il a ordonné la destruction du stock des produits saisis.

Le CNOP s’est constitué partie civile et s’est vu allouer la somme de 1 000 euros à titre de dommages et intérêts.