Les chambres de discipline
Quel est le rôle de la juridiction disciplinaire ?
Les chambres de discipline sont les organes juridictionnels qui permettent à l’Ordre d’assurer le respect par les pharmaciens de leurs devoirs professionnels.
Présidées par un magistrat administratif, les chambres de discipline sont composées de pharmaciens conseillers ordinaux élus et nommés. Elles sont chargées d’instruire et, le cas échéant, de sanctionner des manquements au code de déontologie et aux règles professionnelles par les pharmaciens inscrits au tableau de l’Ordre à la date à laquelle les faits reprochés ont été commis.
En tant que juridictions, elles respectent les garanties fondamentales de procédure et les droits de la défense :
- le magistrat administratif veille au respect de la procédure et garantit le respect du principe du contradictoire dans les débats ;
- l’audience est publique (NB : les conseillers ordinaux siégeant en chambre de discipline sont tenus au secret du délibéré).
Ces juridictions spécialisées sont indépendantes par rapport aux juridictions pénales et civiles. Elles ne prononcent que des sanctions prévues par le code de la santé publique (CSP). Elles ne peuvent pas, par exemple, condamner au paiement d’une somme d’argent pour réparer un préjudice autre que celui causé par une procédure abusive.
Qui peut former une plainte disciplinaire ?
- Les autorités de santé : le ministre chargé de la Santé, le ministre chargé de la Sécurité sociale, le directeur général de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM), le directeur général de l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) pour les pharmaciens des établissements relevant de leurs contrôles respectifs, le directeur général de l'agence régionale de santé (ARS).
- Le procureur de la République.
- Les représentants de la profession : le président du Conseil national, d'un conseil central ou d'un conseil régional de l'Ordre des pharmaciens.
- Les pharmaciens inscrits à l’un des tableaux de l’Ordre.
- Les particuliers.
Quel est le circuit d’une plainte ?
- À réception de la plainte, le conseil de l’Ordre saisi l’enregistre. Cette date sert de référence pour tout le calendrier de la procédure.
- Dans un délai de 15 jours, la plainte est notifiée au pharmacien poursuivi. Il en reçoit une copie.
- Si la plainte émane d’un particulier, d’un pharmacien inscrit à l’Ordre, d’un syndicat, d’une association de pharmaciens, d’une personne morale inscrite au tableau de l’Ordre, d’une association de défense des droits des patients, des usagers du système de santé ou des personnes en situation de précarité, dans un délai de trois mois, le conseil central ou le conseil régional compétent organise obligatoirement une procédure de conciliation.
- En cas de non-conciliation, de conciliation partielle, ou si la plainte émane d’une autorité publique, la chambre de discipline du conseil central ou régional compétent examine l'affaire.
- À l'issue de l’audience et du délibéré, la chambre de discipline prend sa décision. L'audience est publique. Le délibéré reste secret. La décision est rendue publique par lecture de son dispositif à l'issue du délibéré et/ou par voie d'affichage dans les locaux de l'Ordre. Elle est notifiée aux parties par lettre recommandée avec accusé de réception.
Qu’est-ce que la conciliation ?
C’est une phase de règlement à l’amiable des litiges qui peut intervenir préalablement à la saisine de la chambre de discipline. Elle a lieu lorsque la plainte émane d’un particulier ou d’un pharmacien inscrit à l’Ordre, et ce, quelle que soit la nature du différend (art. R. 4234-2 du CSP).
Cette procédure est supervisée par un ou plusieurs « conciliateurs » neutres qui sont des conseillers ordinaux désignés par le président du conseil central ou régional compétent. Ils reçoivent les parties, les incitent à renouer le dialogue et leur suggèrent des solutions.
À l’issue de cette phase :
- la conciliation est totale : la procédure prend fin, la plainte n’est pas transmise à la chambre de discipline ;
- la conciliation ne réussit que partiellement : dans ce cas, les griefs sur lesquels la conciliation n’a pas abouti sont transmis à la chambre de discipline du conseil de l’Ordre compétent ;
- la conciliation échoue : la procédure continue et la plainte est transmise à la chambre de discipline du conseil de l’Ordre compétent.
Un dépaysement de la conciliation peut être demandé si la plainte met en cause un des membres du conseil central ou régional (article R. 4234-39 du CSP).
Quelle est la composition d’une chambre de discipline ?
En première instance, les chambres de discipline sont constituées des membres du conseil régional ou central de la section concernée, sauf les présidents des conseils régionaux qui ne peuvent siéger. Elles sont présidées par un magistrat administratif.
En appel, c’est la chambre de discipline du Conseil national de l’Ordre, comprenant des conseillers élus de toutes les sections et des professeurs nommés, qui examine la requête d’appel. Elle est présidée par un conseiller d’État.
En première instance comme en appel, un rapporteur est désigné parmi les membres du conseil par le président de la chambre de discipline. Le rapporteur peut auditionner le pharmacien poursuivi et le plaignant, éventuellement les témoins. Il rédige ensuite un rapport qui constitue un exposé objectif des faits de la plainte.
La récusation d’un membre de la chambre de discipline est possible, soit à l’initiative de celui-ci, soit à la demande de l’une des parties.
La plainte peut également faire l’objet d’un renvoi pour cause de suspicion légitime, si l’impartialité des membres de la chambre de discipline ne peut être garantie.
À noter que la juridiction d’appel du Conseil national de l’Ordre des pharmaciens est également compétente pour se prononcer en appel sur les décisions rendues par les juridictions disciplinaires de première instance des ordres de Nouvelle-Calédonie et de Polynésie française.
Quelles sanctions peuvent être prononcées ?
En cas de faute, les chambres de discipline soit rejettent la plainte, soit sanctionnent le pharmacien poursuivi au regard de l’une des sanctions prévues à l’article L. 4234-6 :
- l’avertissement ;
- le blâme avec inscription au dossier ;
- l'interdiction temporaire ou définitive de servir une ou la totalité des fournitures faites, à quelque titre que ce soit, aux établissements publics ou reconnus d'utilité publique, aux communes, aux départements ou à l'État ;
- l'interdiction d’exercer la pharmacie, pour une durée maximum de cinq ans avec ou sans sursis ;
- l'interdiction définitive d'exercer la pharmacie. Les deux dernières sanctions comportent l'interdiction définitive de faire partie de l’un des conseils de l'Ordre.
Quels sont les recours ?
L’appel
Si l’une des parties souhaite contester la décision prise par la chambre de discipline de première instance, elle peut faire appel, dans un délai d'un mois à compter de la notification de la décision, devant la chambre de discipline du Conseil national qui est saisie pour rejuger l'affaire. Cette démarche suspend l’exécution de la sanction jusqu’à ce que la chambre de discipline du Conseil national statue.
La cassation
La contestation d’une décision d’appel est possible par l’introduction d’un pourvoi en cassation devant le Conseil d’État dans un délai de deux mois à compter de sa notification.
Contrairement à l’appel, ce pourvoi n’a pas d’effet suspensif. Toutefois, une demande de sursis à exécution de la sanction peut être formée devant le Conseil d’État à l’appui du pourvoi en cassation.
Procédure applicable aux refus de soins discriminatoires et aux dépassements d'honoraires abusifs ou illégaux
Les décrets n°2020-1215 du 2 octobre 2020 et n° 2021-635 du 20 mai 2021 ont créé une procédure propre applicable aux refus de soins discriminatoires et aux dépassements d’honoraires abusifs ou illégaux. Cette procédure peut aboutir à la saisine des chambres de discipline.
Activité de la chambre de discipline du Conseil national en 2021
- 106 affaires enregistrées par la juridiction d'appel
- 100 affaires jugées
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