Tous Pharmaciens La revue n°27 - avril 2025
L'ACTU DÉCRYPTÉE
Mieux anticiper les ruptures à l'échelle européenne
09/04/2025
Europe - Ruptures

Les titulaires d’autorisations de mise sur le marché (AMM) doivent renseigner une plateforme de données à l’échelle européenne pour permettre d’anticiper des risques de rupture. L’objectif est d’éviter tout arrêt de traitement pour les patients.
Lancée officiellement le 29 janvier dernier, l’European Shortages Monitoring Platform (ESMP) constitue une étape clé dans la lutte de l’Union européenne contre les tensions d’approvisionnement en médicaments. Elle fait suite aux travaux engagés depuis 2022 pour construire une plateforme européenne visant à collecter les données relatives aux pénuries, en provenance des titulaires d’autorisations de mise sur le marché (MAHs) et des autorités compétentes nationales (NCAs). Dès le 28 novembre 2024, les MAHs ont reçu un guide d’utilisation et un accès aux premières fonctionnalités de la plateforme, dans le but de déclarer en routine les pénuries constatées sur les produits dont ils sont titulaires.
Évaluer le niveau d’urgence
La plateforme européenne comporte trois modules distincts :
- un module pour les déclarations de routine obligatoires concernant les médicaments enregistrés en procédure européenne centralisée,
- un module « prévention » pour la préparation à une urgence de santé publique ou à un événement majeur,
- et un module « crise » en cas d’urgence de santé publique ou d’événement majeur.
Pour chacune de ces situations, les MAHs sont tenus de communiquer des informations sur la pénurie, les plans de prévention et de réduction des risques, l’évaluation de l’impact de la pénurie et les alternatives thérapeutiques possibles. Dans les situations de prévention ou de crise avérée, ils doivent aussi indiquer le statut de commercialisation du médicament, les parts de marché, les volumes de vente et prévisions de stocks et de ventes, avec les dates prévisibles de difficultés, ainsi que des informations sur la fabrication, le nombre de patients potentiellement concernés…
Ces données permettent à l’agence européenne (EMA) de simuler un scénario de crise et d’anticiper les besoins en médicaments critiques sur six mois, sur la base du nombre de patients concernés et des posologies moyennes, de gérer les stocks et les approvisionnements.
Une mobilisation essentielle des acteurs
En France, c’est l’ANSM* qui est chargée d’inciter les MAHs à contribuer au renseignement de la plateforme.
"Pour le moment, l’ESMP et la plateforme Trustmed ne sont pas interopérables, explique-t-on à l’ANSM, ce qui ne nous permet pas de récupérer les données de l’ESMP. Nous attendons donc des industriels qu’ils continuent de renseigner la plateforme Trustmed de la façon la plus correcte, exhaustive et à jour." Une exigence bien comprise des laboratoires pharmaceutiques, comme le souligne Stéphane Simon, président de la section B, représentant les pharmaciens de l’industrie : "Le dispositif, structuré en fonction de la criticité des situations, va permettre d’adapter les mesures à prendre en fonction des situations constatées. Même si le niveau d’information demandé est exigeant, nous sommes pleinement engagés pour répondre aux attentes des autorités européennes. C’est un dispositif complémentaire des systèmes existants, notamment du DP-Ruptures opéré par l’Ordre."
* Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé.