La Pr. Agnès Buzyn, ancienne ministre de la Santé, mène un combat salutaire : redonner à la science et à la recherche un rôle central dans l’élaboration des politiques publiques et, au-delà, dans les débats de société. C’est la raison d’être du think tank Evidences, créé en mars dernier.

À l’occasion de mon parcours professionnel, partagé entre la recherche, la pratique médicale et l’engagement politique, j’ai pu poser un constat préoccupant : la science et la recherche sont, aujourd’hui, absentes de la décision politique.  

Avec la montée en puissance de l’obscurantisme, l’opinion prend le pas sur la rationalité scientifique. Et la France a renoncé à investir davantage dans la recherche et l’innovation. Or, un pays qui ne le fait pas prend le risque de ne pas créer de richesse pour l’avenir et de perdre sa souveraineté. La démarche scientifique elle-même demeure mal connue et mal comprise par une large part de la population. Et le monde politique reste assez déconnecté des enjeux scientifiques. Outre la réduction préoccupante du budget consacré à la recherche, les scientifiques sont de moins en moins présents dans les grandes administrations.

La science, vecteur de démocratie

C’est pour réconcilier la science, la politique et la société, que j’ai lancé, en mars dernier, le think tank Evidences, aux côtés de Mélanie Heard de Terra Nova. L’idée m’est venue bien avant l’arrivée de Donald Trump au pouvoir. Mais ses initiatives hostiles à la science témoignent de la nécessité d’agir. Ma conviction est que la science fait partie intégrante de la démocratie. En cherchant à établir le réel, elle aide à construire le « vivre ensemble » et à s’entendre sur les actions à mener pour préserver notre modèle de société. Quand on nie les faits au profit de l’opinion, quand on distord la réalité, quand on s’éloigne de la vérité scientifique, on fait le lit des populismes.

Pr. Agnès Buzyn
ancienne ministre de la Santé

guillemets

« Ma conviction est que la science fait partie intégrante de la démocratie. »

Démontrer comment se bâtit la science

Avec Evidences, notre objectif est d’expliquer comment on construit de la connaissance. Il faut démontrer que la science est le produit de partages répétés d’hypothèses, d’expériences et de résultats. Elle s’édifie progressivement, avec méthode et rigueur, avant d’aboutir à des consensus qui permettent aux communautés de chercheurs de s’accorder, à un moment donné, sur un fait scientifique avéré.  Il est essentiel de faire preuve de pédagogie, notamment auprès des plus jeunes, très exposés aux réseaux sociaux et aux théories du complot. Mais il faut également rapprocher les chercheurs et les politiques, afin que la science puisse contribuer aux politiques publiques.

Quatre axes de travail

Quatre champs de réflexion animent nos travaux : promouvoir l’esprit scientifique et la pensée critique en démocratie, contribuer à l’attractivité des filières scientifiques et techniques, placer la science et l’expertise au cœur de la décision publique, soutenir la recherche et l’innovation en tant qu’enjeu de progrès social et de souveraineté. Pour les faire vivre, nous menons plusieurs types d’initiatives : des notes et rapports visant à apporter de la connaissance, des colloques et événements destinés à élargir les lieux de débat, des contributions politiques permettant d’intégrer la science dans le débat public.

Le pharmacien, un scientifique proche du public

Je suis heureuse de pouvoir évoquer cette démarche auprès des pharmaciens. J’ai un profond respect pour cette profession, qui allie la rigueur de la science « in vivo » et la capacité à la rendre concrète et pédagogique pour les patients. Les pharmaciens sont, en quelque sorte, des hérauts de la science en proximité du public, dont ils ont la confiance. Face aux défis qui les attendent, celle d’une science du médicament en profonde transformation, je suis persuadée qu’ils suivront et collaboreront avec intérêt aux travaux d’Evidences.

Pr. Agnès Buzyn
ancienne ministre de la Santé

guillemets

« J’ai un profond respect pour la profession du pharmacien, qui allie la rigueur de la science « in vivo » et la capacité à la rendre concrète et pédagogique pour les patients. »