Plusieurs cas de complications infectieuses d’issue parfois fatale chez des adultes et des enfants ayant pris des anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS), sur prescription ou en automédication, ont été rapportés à l'ANSM en mars 2023 par des centres régionaux de pharmacovigilance (CRPV). Ces complications peuvent survenir y compris en cas de coprescription d’antibiotiques. Dans un contexte de recrudescence des infections invasives à streptocoques A, l'ANSM rappelle les règles de bon usage de ces médicaments.

Actualisation du 27/04/2023

Les AINS, tels que l’ibuprofène, le kétoprofène, sont parmi les médicaments les plus utilisés en automédication comme antalgiques (anti-douleurs) ou antipyrétiques (anti-fièvre) chez les adultes et les enfants.

L’ibuprofène et le kétoprofène peuvent masquer les symptômes comme la fièvre ou la douleur et donc conduire à un retard de diagnostic et de prise en charge du patient. Cela peut avoir pour conséquence un risque de complications graves de l’infection.

C’est pourquoi l'ANSM rappelle que dans un contexte de douleur et/ou fièvre, notamment en cas d’infection courante comme une angine, une infection dentaire ou une toux, il est conseillé de privilégier l’utilisation du paracétamol.

Informations pour les patients et les professionnels de santé

  • Privilégiez l’utilisation du paracétamol en cas de douleur et/ou de fièvre, notamment dans un contexte d’infection courante comme une angine, une rhinopharyngite, une otite, une toux, une infection pulmonaire, une infection dentaire, une lésion cutanée ou la varicelle.
  • A retenir pour un bon usage des AINS en cas de douleur et/ou fièvre :
    • Prescrire et utiliser les AINS à la dose la plus faible possible et sur la durée la plus courte possible (3 jours si fièvre, 5 jours si douleurs)
    • Arrêter le traitement dès la disparition des symptômes
    • Ne pas prendre en même temps un autre AINS
    • Eviter les AINS en cas de varicelle.
  • Parents, si la température de votre enfant ne dépasse pas 38,5° C, il n'est pas nécessaire de lui donner un médicament contre la fièvre.
    Des gestes simples permettent de le soulager, avant d’envisager l’administration d’un médicament contre la fièvre : lui enlever des épaisseurs de vêtements, sans le déshabiller complètement ; l’installer dans une pièce fraîche et aérée (entre 18 et 20°C). Donnez-lui souvent à boire de l’eau fraîche, même s'il ne vous le demande pas.

Si vous êtes actuellement traité au long cours par un anti-inflammatoire non stéroïdien, par exemple pour une pathologie rhumatismale, n’arrêtez pas votre traitement et rapprochez-vous de votre médecin si vous avez des doutes, notamment en cas de fièvre.
Tous les AINS sont contre-indiqués à partir du début du 6e mois de grossesse et leur utilisation doit se faire avec précaution avant cette période.

Actualisation du 20/05/2020

A la demande de l’ANSM, le Comité européen en charge de l’évaluation des risques et de la pharmacovigilance (PRAC) a analysé l’ensemble des données disponibles sur le risque de complications infectieuses et la prise d’AINS (ibuprofène et kétoprofène).

Suite à cette analyse, le PRAC a conclu en avril 2020 que la prise d’ibuprofène ou de kétoprofène (par voies orale, rectale ou injectable) peut entrainer, lors de certaines infections, un masquage des symptômes comme la fièvre ou la douleur, conduisant à un retard de prise en charge du patient avec pour conséquence un risque de complications de l’infection. Le PRAC a également conclu que ce risque a été observé pour des infections bactériennes dans un contexte de varicelle et de pneumonie.

Afin de réduire ce risque, le PRAC a recommandé que l’ensemble des documents d’information (notices pour les patients et/ou résumé des caractéristiques du produit) de toutes les spécialités contenant de l’ibuprofène ou du kétoprofène soient modifiées pour mentionner :

  • le risque de masquer les symptômes d’une infection bactérienne en prenant ces AINS ;
  • une recommandation aux médecins de suivre l’évolution de l’infection en cas d’utilisation de ces médicaments dans un tel contexte ;
  • une consigne pour les patients de consulter leur médecin si les symptômes de fièvre et/ou de douleur persistent ou s’aggravent, et d’utiliser l’ibuprofène et du kétoprofène à la dose minimale efficace pendant la durée la plus courte nécessaire au soulagement de ces symptômes.

Des textes de référence seront communiqués par l’agence Européenne du médicament prochainement, sur la base desquels les titulaires des autorisations de mise sur le marché devront modifier les documents d’information de leurs spécialités concernées.

Dans ce contexte, l'ANSM rappelle les règles de bon usage de l’ibuprofène et du kétoprofène lorsqu’ils sont utilisés pour traiter une fièvre et/ou des douleurs ponctuelles.

Information du 18/04/2020

Suite aux signalements de complications infectieuses graves avec les Anti-Inflammatoires Non Stéroïdiens (AINS) utilisés dans la fièvre ou la douleur, l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) a confié, en juin 2018, aux centres régionaux de pharmacovigilance de Tours et Marseille, une enquête nationale de pharmacovigilance portant sur les deux AINS les plus utilisés dans ces indications, l’ibuprofène et le kétoprofène.

Les conclusions de cette enquête suggèrent le rôle aggravant de ces AINS en cas d’infection. L’ANSM a partagé ces résultats avec ses homologues européens afin qu’une analyse collective soit engagée.
Les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) tels que l’ibuprofène et le kétoprofène font l’objet de signalements de pharmacovigilance portant sur des complications infectieuses graves.

Les centres régionaux de pharmacovigilance de Tours et Marseille ont réalisé une enquête de pharmacovigilance afin d’investiguer le risque de complications infectieuses grave associé à la prise d’un AINS chez l’adulte et l’enfant en se focalisant sur les deux AINS indiqués dans la fièvre et les douleurs légères à modérées les plus utilisés : l’ibuprofène et le kétoprofène .

L’objectif de cette enquête était de déterminer si ces complications infectieuses graves étaient favorisées par la prise de l’AINS ou si elles traduisaient l’évolution de la pathologie infectieuse initiale.

Résultats de l’enquête :

Sur l’ensemble des cas rapportés depuis l’année 2000, 337 cas de complications infectieuses avec l’ibuprofène et 49 cas avec le kétoprofène ont été retenus après avoir pris en compte uniquement les cas les plus graves chez des enfants ou des adultes (souvent jeunes) sans facteur de risque ni comorbidité. Il s’agit d’infections sévères de la peau et des tissus mous (dermohypodermites, fasciites nécrosantes,…), de sepsis, d’infections pleuro-pulmonaires (pneumonies compliquées d’abcès, de pleurésie), d’infections neurologiques (empyèmes, abcès cérébraux,…) ou ORL compliquées (cellulites, médiastinites,...), à l’origine d’hospitalisations, de séquelles voire de décès.

Ces complications infectieuses (essentiellement à Streptocoque  ou à Pneumocoque ) ont été observées après de très courtes durée de traitement (2 à 3 jours), y compris lorsque la prise d’AINS était associée à une antibiothérapie. Elles sont survenues alors que l’ibuprofène ou le kétoprofène étaient prescrits ou pris en automédication dans la fièvre mais également dans de nombreuses autres circonstances telles que des atteintes cutanées bénignes d’aspect inflammatoire (réaction locale, piqure d’insecte,…), des manifestations respiratoires (toux, infection pulmonaire,…) ou ORL (dysphagie, angine, otite,…).

L’analyse de ces cas ainsi que l’analyse des données de la littérature (études expérimentales et études de pharmaco-épidémiologie),  suggère que ces infections, en particulier à Streptocoque, pourraient être aggravées par la prise de ces AINS.

L’enquête met également en évidence qu’il persiste une utilisation de ces AINS en cas de varicelle. L’ANSM rappelle que les AINS sont déjà connus comme pouvant être à l’origine de complications cutanées bactériennes graves (fasciite nécrosante) lorsqu’ils sont utilisés au cours de la varicelle et doivent être évités dans ce cas.

Dans ce contexte, l’ANSM souhaite mettre en garde, dès à présent, les professionnels de santé, les patients et les parents sur ce risque de complication infectieuses graves susceptibles d’avoir des conséquences sérieuses pour la santé des patients.

Source : Actualité publiée le 18/04/2019, mise à jour le 28/04/2023 sur le site de l'ANSM