Demandé par la Première ministre en début d’année, le rapport de la mission “Régulation des produits de santé” a été remis la semaine dernière au ministre de la Santé et de la Prévention, au ministre délégué chargé de l’Industrie ainsi qu’au ministre délégué aux Comptes publics. Focus sur quelques propositions qui concernent les pharmaciens.

En janvier 2023, Matignon avait confié à six personnalités qualifiées la mission “d’identifier les voies d’évolution possibles du système de financement et régulation des produits de santé permettant de concilier l’atteinte de plusieurs objectifs collectifs” : accès rapide des patients aux produits innovants validés par les autorités sanitaires, lutte contre les pénuries, soutenabilité des dépenses, équilibre et équité dans la répartition des efforts, relocalisation de produits de santé stratégiques dans un objectif de souveraineté sanitaire, renforcement du tissu productif français, notamment en produits matures essentiels et en produits très innovants, et attractivité du territoire pour les industriels.

En 170 pages, la mission appelle à un “New Deal”, garantissant un accès égal et durable des patients à tous les produits de santé, la durabilité intégrant les notions de soutenabilité financière, de résilience et d’impact environnemental. Elle formule également des propositions en faveur de la juste prescription et de la "sobriété médicament", auprès des patients comme des prescripteurs.

TROD et prescription d’antibiotiques par le pharmacien

Parmi les mesures proposées, l’une concerne la prise en charge des angines et des cystites dans le contexte du développement des “parcours officinaux” (parcours de soin dans lesquels des pharmaciens formés pourraient prescrire de façon encadrée). Celle-ci permettrait au pharmacien, suite à un test rapide d’orientation diagnostique (TROD), de prescrire et délivrer un traitement antibiotique, lorsque l’infection bactérienne est confirmée. À l’occasion d’un déplacement à Rouen le 31 août 2023, la Première ministre a annoncé que cette mesure, récemment préconisée dans le rapport “charges et produits” de la CNAM, pourrait être présentée dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2024.

Au même titre que la possibilité récemment ouverte de prescrire et administrer certains vaccins, cette recommandation permettant la prescription d’antibiotiques par les pharmaciens rejoint une proposition portée par l’Ordre depuis plusieurs années.

Dans les établissements de santé

Le rapport appelle à poursuivre et accélérer la professionnalisation des achats de produits de santé dans les hôpitaux publics, et à approfondir la dimension durable des achats hospitaliers, en y intégrant de nouveaux enjeux de résilience, d’écologie, de recours aux PME, etc.

Des recommandations visant à lutter contre les pénuries et verdir la distribution

Afin d’éviter de voir disparaître certaines molécules, le rapport propose de réallouer une partie des marges liées aux ventes de génériques des officinaux vers les industriels, afin de “redonner des marges de rentabilités aux entreprises concernées”. Cette perte de remise commerciale  pourrait, selon les auteurs, être compensée par la rémunération des nouvelles missions des pharmaciens.

Une révision du système de distribution, considéré comme coûteux et non optimal, est proposée notamment via un allègement des obligations de service public ou la suppression de la marge de distribution pour les acteurs non soumis aux obligations de service public. Une évaluation des impacts CO2 est également envisagée en vue de verdir la distribution.

Face au constat d'une augmentation des exports, le rapport propose de limiter les exportations parallèles pour les produits à risque de pénurie. Leur interdiction serait étendue aux distributeurs en gros à l’exportation, avec les mêmes sanctions que celles actuellement appliquées aux grossistes-répartiteurs. Une interdiction d’exportation parallèle au sein de l’Europe devrait également être envisagée pour les dépositaires et leur donneur d’ordre, en cas de risque de pénurie.

Le ministère de la Santé et de la Prévention n’a pas indiqué à ce stade si l’ensemble des recommandations de ce rapport seraient retenues.

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